La RELIGIEUSE et ses secrets

Publié le 23 février 2023

En toutes occasions, que ce soit pour un souper entre amis au chalet, une soirée romantique, un repas en camping, ou un cinq à sept, la fondue au fromage est toujours un régal. Mais en plus d’être un pilier de convivialité sur les tables de tous les amateurs de fromages, et un plat culte émergeant pour une nouvelle génération de « foodies », la fondue au fromage comporte une multitude de rituels plus ou moins folkloriques. À titre d’exemple, il y a la « punition » pour ceux qui perdent leur morceau de pain (ou de légume) dans le caquelon. Le châtiment consiste à embrasser le convive assis à droite ou à gauche, à chanter une chanson ou à faire un « toast ». Mais plus encore, il y a la RELIGIEUSE… oui, oui vous avez bien lu ! Quand la fondue au fromage est dévorée, il faut décoller la fine croute de fromage dorée et croustillante au fond du caquelon. C’est ça, la religieuse ! À quoi pensiez-vous ?

Un peu de contexte

Depuis 1984, la tradition de la « religieuse » demeure au cœur de l’expérience 1001 Fondues. Les deux restaurants à l’origine de l’entreprise — Au Chalet Suisse et La Grolla — ont toujours activement partagé ce délicieux secret avec les amateurs de fondue au fromage du Vieux Québec. Les convives initiés à cette façon abracadabrante de terminer une fondue demandaient fréquemment d’où vient l’expression « la religieuse », comme si de rien n’était. Le simple fait de chercher une réponse à cette question à cent piastres constitue en soi un véritable voyage aux 1001 interprétations…

La religieuse : souplesse d’interprétation

S’il est établi que le mot « religieuse », connu avec ce sens, est uniquement utilisé en Suisse romande et en Savoie, en revanche son origine demeure factuellement inconnue. En dernière analyse, tout ce qui nous reste, ce sont des hypothèses… beaucoup d’hypothèses. La plupart des ouvrages traitant de l’histoire du fromage et de la raclette ne font que l’expliquer, sans justifier son origine. Toutefois, Jacques Montandon donne dans ses ouvrages une anecdote qui pourrait en expliquer la provenance. Il s’agit ici d’une première hypothèse. D’après lui, l’expression « religieuse » serait née du fait que lorsque les religieuses vivant dans la frugalité visitaient leurs familles au début du XXe siècle, elles leur demandaient de mettre de côté tout ce qui n’était pas utilisé en cuisine, comme les croûtes de fromage. Elles auraient utilisé ces dernières pour leur gratin. Celui-ci étant très bon, on a commencé à manger régulièrement ce qui était auparavant réservé à l’assiette de la religieuse. Voici une autre hypothèse (aussi issue de la sphère du religieux) formulée par Dominik Flammer dans son ouvrage « Fromages suisses » : le terme « la religieuse » viendrait du fait que les moines, quand ils s’étaient régalés de morceaux de fromage, ne laissaient que la croûte aux croyants qui se délectaient de ces morceaux — encore aujourd’hui pour les gourmets un vrai délice ! Bon nombre d’interprétations semblent tenir la route. Mais à trop chercher la réponse, on en oublie la question. Peut-être appelle-t-on cette croûte « religieuse » simplement en référence au fait qu’en la décollant du caquelon, sa forme ressemble un peu à la coiffe des religieuses d’antan, ou parce que son goût était considéré comme rien de moins que divin. Pour 1001 Fondues, toutes les hypothèses sont sur la table !

Astuces pour une fondue avec ou sans «  religieuse  »

Pour obtenir de la religieuse, il est préférable d’utiliser un caquelon en fonte émaillée (lire : éviter les casseroles en matériaux antiadhésifs), une cuillère de bois (vous éviterez ainsi de rayer le caquelon), et au besoin, un couteau à bout non pointu. Vous l’aurez deviné, cette croûte céleste au goût exquis de gratin n’’est pas toujours facile à enlever. Il faut gratter le fond du caquelon lorsque la flamme est encore présente (mais pas trop forte). Malgré ce petit défi, les connaisseurs et gourmets de ce monde se battent pour manger la mystérieuse religieuse. Ils estiment qu’il s’agit de la meilleure partie de la fondue. Mais ne vous y trompez pas  ! Le camp adverse — celui qui cherche à éviter la formation d’’une religieuse — a pour seul mot d’’ordre : remuer, remuer et remuer encore  ! Catégoriquement, toutes les écoles de pensée ne sont pas équivalentes en matière de religieuse. D’ailleurs, certains puristes recommanderont, pour l’’apprécier, à l’instar de certains montagnards, de casser un œuf au fond durci du caquelon en toute fin de cuisson pour amalgamer les restes de fromage et éviter qu’’ils durcissent. Enfin, comme pour la plupart de nos idées-recettes, de multiples variantes sont chaque fois à l’’œuvre. À vous d’explorer  ! Trouvez religieusement ce qui est bon et vrai pour vous  !